lundi 28 avril 2014

Pourquoi le couple Franco-Allemand fait-il chambre à part ?

 

 
 


"L'observatoire de la démocratie en France" - sondage Viavoice, Terra Nova, la Revue civique, Le Monde, France Inter, LCP

 
 
 
 
 
Viavoice et ses partenaires, dont Terra Nova, publient aujourd'hui les résultats d'un sondage sur le regard que portent les Français sur leur démocratie et ses institutions. En effet, la démocratie en France « fonctionne mal » : près des deux tiers des personnes interrogées (64 %) le pensent.
Mais ce baromètre annuel ne consiste pas en une nouvelle exploration des pathologies de la démocratie. La mutation de la démocratie ne pourra s’accomplir sans le soutien, voire l’impulsion des citoyens eux-mêmes. Pour cette raison, cette enquête vise à identifier quelles sont, pour l’opinion française aujourd’hui, les meilleures voies d’optimisation de la démocratie au cours des années qui viennent : une quarantaine de solutions ont été évaluées.
 
 
Les données obtenues révèlent une aspiration profonde visant à replacer la démocratie au coeur de la société. Et cette aspiration apparaît bien plus importante que les souhaits de réformes de la citoyenneté ou des institutions. Elle constitue une réponse au divorce alarmant résumé par un électeur : « Il y a leur démocratie et il y a ma vie... ».
 1. Placer l’action publique sous « l’oeil du peuple »
Le premier registre de solutions consiste à placer l’action publique sous « l’oeil du peuple » et notamment :
- Avoir « des dirigeants qui expliquent davantage le sens de leur action, leur
vision » (85 %) ;
- Avoir « des dirigeants qui présentent davantage le bilan de leur action » (86 %) ;
- « Rendre systématique l’évaluation des politiques publiques deux ou trois ans après leur mise en oeuvre » (81 %) ;
- « Permettre à une assemblée de citoyens de démettre des élus qui ne respectent pas leurs engagements » (82 %). Dans son principe, ce dispositif correspond à la procédure de « recall » appliquée notamment aux États-Unis, et permettant à des citoyens, par pétition, de demander un référendum pouvant conduire à la
destitution d’un gouverneur (État de Californie).
Ces attentes sont fondamentales parce qu’elles traduisent :
- La défiance envers la politique, qui justifie un contrôle plus étroit de l’action publique par les citoyens ;
- Une vision contractuelle de la démocratie, en vertu de laquelle des candidats s’engagent sur un projet sur la base duquel ils peuvent être remerciés si la mission
n’est pas menée à bien. Il s’agit d’une politique envisagée à la manière d’une « prestation de service », choisie et éventuellement réprouvée par des « clientscitoyens ».

2. Renouveler plus fréquemment les élus

Le deuxième registre consiste à « renouveler davantage le personnel politique ». L’un des principaux reproches adressés à notre démocratie vise en effet une classe politique trop professionnalisée, et pour cette raison éloignée des citoyens. Concrètement, 80 % des personnes interrogées estiment que ce renouvellement constitueraient une « bonne solution ». Et cette opinion ne constitue pas la traduction d’un clivage entre sensibilités politiques : les Français de tous horizons la partagent. Cette exigence conduirait par exemple à « imposer aux élus de ne détenir qu’un seul mandat à la fois » (84 %) ou à « imposer aux élus de ne détenir que deux mandats successifs d’une même fonction » (75 %).

3. Ouvrir les institutions politiques sur la société

Le troisième registre de solutions souhaitées vise à ouvrir les institutions politiques sur la société :
- En « généralisant l’organisation de primaires ouvertes aux citoyens pour choisir les candidats aux élections » (63 %) ; cette idée, promue notamment par Olivier Ferrand et Arnaud Montebourg (Primaire : comment sauver la gauche, Seuil, 2009), s’inscrit dans l’héritage de pratiques à l’oeuvre aux débuts de la IIIème République, avant l’apparition des partis politiques. Son succès pour départager les candidats socialistes en vue de la présidentielle de 2012 lui a conféré une légitimité supplémentaire ;
- En ouvrant « davantage les partis politiques sur la société » (75 %) et en rendant « le fonctionnement des partis politiques plus transparent » (88 %) ;
- En introduisant « davantage de proportionnelle dans les assemblées élues » (64 %).

4. Instituer des passeurs entre société et politique

Le quatrième registre entend instituer des « passeurs » entre société et politique :
- Ces « passeurs » peuvent être des « personnes-relais », instituées « dans les quartiers » au plus près des habitants, « expliquant la démocratie et incitant les
citoyens à participer aux élections et à la vie démocratique » (66 %) ;
- Ils peuvent être également des dirigeants politiques, dont on aimerait qu’ils soient obligés « de partager, plusieurs jours par an, la vie quotidienne d’une famille
modeste » (63 %), ou qu’ils « échangent directement en face-à-face avec les électeurs (réunions publiques, marchés, porte-à-porte) » (77 %), ou dans une  moindre mesure sur Internet (61 %).

5. Apprendre la démocratie

Enfin, la quasi-totalité des personnes interrogées (90 %) estiment que « la démocratie est quelque chose qui s’apprend, qu’il faut transmettre et expliquer ».
Les trois éléments à transmettre, « au collège ou au lycée » pourraient être « les valeurs de la démocratie » (93 %), « le fonctionnement de notre système
démocratique » (93 % également) et « l’histoire de la démocratie » (89 %).
Réformer la citoyenneté ou les institutions
 
En revanche, les hypothèses de réformes de la citoyenneté ou des institutions sont moins prisées :
- La suppression de « la fonction de président de la République » est considérée comme une « mauvaise solution » par 64 % des personnes interrogées, celle du
« Premier ministre » par 58 % ; mais de manière singulière dans le contexte actuel, 69 % qualifient de « bonne solution » l’idée de décerner « davantage de  pouvoirs aux collectivités territoriales », en lien direct avec les publics ;
- En termes de citoyenneté, l’abaissement de l’âge légal de la majorité à 15 ans est cité comme une « mauvaise solution » par 88 % des personnes interrogées, et l’extension du droit de vote à « tous les étrangers résidant en France depuis plus de dix ans » par 61 %.
 Conclusion : souveraineté et représentation, plus que citoyenneté et institutions
 L’aspiration dominante visant à replacer la démocratie au coeur de la société constitue une réponse aux deux urgences auxquelles notre démocratie est confrontée : un déficit de souveraineté, et un déficit de représentation. Vouloir mettre la démocratie au coeur de la société, cela signifie simultanément assurer une meilleure souveraineté du peuple, et une meilleure représentation du peuple.
Longtemps, ces missions ont été autorisées par une vision conceptuelle du « peuple », puis par le lien sociologique du « peuple » avec les notables ou la
bourgeoisie. Aujourd’hui, c’est cette refondation majeure qui est attendue. Elle est bien plus ambitieuse, politiquement, sociétalement et conceptuellement, qu’une extension de la citoyenneté ou une révision des institutions. C’est n’est pas de changer de République dont il s’agit ; c’est bien de refaire démocratie.
 
 
François Miquet-Marty
Président, Viavoice
Les oubliés de la démocratie, Michalon, 2011
 
 


mardi 8 avril 2014

Guerre aux éleveurs, guerre aux animaux d'élevage!

....

Guerre aux éleveurs, guerre aux animaux d'élevage!

Après dix millénaires de vie commune avec les animaux, nous arrivons à un point de rupture anthropologique et politique majeur dont l'enjeu est de rompre avec les animaux domestiques, en tout premier lieu avec les animaux d'élevage, et d'achever le processus d'industrialisation de la production alimentaire, c'est-à-dire de la soustraire définitivement des mains des éleveurs et des paysans pour la confier aux multinationales et aux investisseurs.

La guerre de l'industrie contre les paysans a commencé au 18e siècle en Europe avec le développement de la société industrielle et l'établissement d'un rapport à la nature médié par la science et la technique, fondé sur le profit, et uniquement sur lui. L'élevage a été transformé en " productions animales" et les animaux sont devenus des machines ou des produits. Les paysans, tout comme les luddites, ont résisté à la machinisation de leur relation à la nature et aux animaux. Ils ont résisté au 18e siècle, au 19e siècle, au 20e siècle, et ils résistent encore au 21e siècle. Ils résistent en France, mais plus largement dans la majorité des pays industrialisés.
Fight for food freedom (combat pour la liberté alimentaire)
L'agro-industrie, qui concentre pourtant déjà l'essentiel de la production et de la distribution, tient absolument à réduire à néant les paysans qui persistent à élever leurs vaches ou leurs cochons à l'herbe et aux champs, à les respecter, à les aimer et à leur donner une vie aussi bonne que possible. Et qui tiennent également à offrir aux consommateurs des produits sains, bons, porteurs de sens et de vie. Et qui s'obstinent à revendiquer une dignité et un sens moral dans le travail.
Guerre contre ces éleveurs! Ils doivent lutter pied à pied contre l'agro-industrie et les pouvoirs publics pour élever leurs animaux en accord avec leur sensibilité, maîtriser la sélection de leur troupeau, identifier leurs animaux plutôt que de les "électroniser", les nourrir sans OGM, contrôler leur abattage en leur évitant l'abattoir industriel, transformer leurs produits à la ferme, produire et vendre du lait cru (aux US), ... "Tout ce que je veux faire est illégal", écrit Joël Salatin , et effectivement, on ne peut que le constater, tout ce que les éleveurs veulent faire de bien est illégal. Tout ce qu'ils veulent faire de bien les conduit devant un tribunal. Et aux Etats-Unis, comme le souligne l'auteure du film Farmageddon, l'état, la police, mènent une guerre invisible mais très dure contre les petits paysans.
Une agriculture sans élevage
Mais ce n'est pas tout. Outre l'agro-industrie, les éleveurs doivent aussi lutter contre les auto-proclamés défenseurs des animaux, qui revendiquent une agriculture sans élevage. Pourquoi ? Parce que ces derniers considèrent que les éleveurs exploitent leurs animaux -et cela depuis les débuts de la domestication- et que, par souci de justice et de morale, il faudrait les libérer sans plus tarder (et sans rembourser la dette que nous avons à leur égard d'ailleurs). Haro sur le baudet est aussi la clameur que poussent certains environnementalistes au nom de la planète et, confondant élevage et productions animales, accusent l'élevage d'être responsable de l'effet de serre, de la pollution des eaux, de la réduction de la biodiversité. N'en jetez plus!
Par un opportun concours de circonstances, cette revendication d'agriculture sans élevage coïncide avec le développement de produits industriels bio-tech alternatifs aux produits animaux. Multinationales et fonds d'investissement se sont avisés -tout comme leurs prédécesseurs au 18e et 19e siècle- que la production agricole était plus rentable entre leurs mains qu'entre celles des paysans. Ainsi que l'affirme Joshua Tetrick, directeur de Hampton Creek Food, start-up soutenue par la fondation Bill Gates: "Le monde de l'alimentation ne fonctionne plus. Il n'est pas durable, il est malsain et dangereux. (...) Nous voulons créer un nouveau modèle qui rendrait le précédent obsolète ."
Rendre l'élevage obsolète. Voilà à quoi s'affairent les start-up alimentaires et les prétendus défenseurs des animaux, prosélytes de l'alimentation vegan. Plutôt que des poulets élevés en libre parcours par un éleveur passionné par ses volatiles, achetez du chicken-free chicken à Hampton Creek food; plutôt que du fromage au lait cru acheté sur le marché à un paysan de votre région, achetez du Lygomme ACD Optimum, breveté par Cargill; plutôt que du cochon gascon élevé par un éleveur admiratif de ses cochons et qui tient absolument à vous les faire rencontrer, achetez bientôt du muscle de cochon in vitro -presque bio.
La charge destructrice des multinationales, alliée à la puissance publique et à la consternante naïveté des "défenseurs" des animaux, sonne comme un hallali. Les éleveurs et leurs animaux ne peuvent résister seuls. La relation aux animaux domestiques qu'ils défendent, c'est notre vie tout entière avec les animaux. Après l'exclusion de la vache, viendra celle de votre chien, remplacé par un robot supposé tout aussi capable d'exprimer des émotions et de ressentir les vôtres. Après l'exclusion de la vache et du chien, viendra la nôtre. Et cette exclusion-là est également déjà bien avancée.
Notes :
- Elevage industriel, abattoirs, viande in vitro : faut-il réinventer l'élevage?
- Elevage intensif: 10 raisons de tout changer
- Amis végétariens, vouloir abolir les élevages n'est pas extrémiste, c'est utopiste

Les voyous du poulet industriel, de Tricatel à Beulin !

...

L’émission Capital, diffusée ce dimanche sur M6, est une véritable bombe anti-malbouffe. Montrant les coulisses peu ragoûtantes de la production de poulets à petits prix, elle révèle aussi la duplicité dans le domaine de Xavier Beulin, tout puissant président de la FNSEA, syndicat majoritaire chez les agriculteurs…

De quoi voler dans les plumes des voyous qui nous grugent, nous mentent et nous intoxiquent. Laminés par la concurrence déloyale de pays producteurs de volailles industrielles qui inondent le marché européen avec leurs immondices à bas prix, les éleveurs français dépérissent. M6 diffuse dimanche soir, dans l’émission Capital (1), un terrifiant reportage nous rappelant que si la France demeure le pays du poulet de Bresse et de quelques labels rouges de renom servis sur les bonnes tables, le gros du marché porte sur des volailles produites dans des conditions abominables pour répondre aux prix écrasés de la grande distribution.
Des hangars concentrationnaires français où les volatiles contaminés croupissent dans la vermine et leurs excréments jusqu’aux usines à poulets brésiliennes où l’on fabrique de la chair blanche comme des boulons, les caméras de M6 sont allées fouiller dans les tréfonds d’un système épouvantable. Le mythe du film de Claude Zidi, L’Aile ou la cuisse, avec Coluche et Louis de Funès découvrant horrifiés une machine, dans une usine dirigée par un certain Jacques Tricatel, moulant des poulets avec de la pâte sortant d’un tube s’est fait réalité. Que les pourvoyeurs de malbouffe se rassurent, notre époque n’a pas à rougir des fantasmes de la conso fiction de 1976, elle est pire. Saturé d’antibiotiques pour cause de promiscuité, le poulet industriel consommé à grande échelle rend certaines bactéries résistantes aux traitements médicaux et provoque de plus en plus de décès. Des faits graves, étayées par le témoignage de médecins et de scientifiques confrontés à des situations alarmantes.
 
Mais la bombe explose quand les enquêteurs de Capital, remontant la filière importatrice de poulets industriels brésiliens ou asiatiques vers la France, ruinant au passage les éleveurs français impuissants, arrivent jusqu’à l’usine Farmor, dans les Côtes d’Armor, en Bretagne.
 
Alors qu’il se targue en plein salon de l’Agriculture 2014, de défendre les éleveurs français, les produits français et la filière agro alimentaire française, la caméra de M6 s’approche de Xavier Beulin, tout puissant président de la FNSEA, syndicat majoritaire chez les agriculteurs, pour lui soumettre un document prouvant que Farmor importe du poulet brésilien fabriqué par les usines Sadia. Le visage du leader syndical se crispe. Et pour cause : en tant que président de Sofiprotéol, holding dont dépend Glon-Sanders, c’est lui le patron de Farmor. Beulin bredouille alors quelques mots du genre « Nous ne faisons rien d’illégal » et tourne les talons.
 
Les éleveurs aux abois qu’il est censé défendre apprécieront. Pris en flagrant délit de duplicité, le méchant industriel du film de Zidi, joué par Alain Guyomar, est conspué puis envoyé au diable. Aujourd’hui, Tricatel, c’est Xavier Beulin !
 
 
 
 
FSEA-NUI-SANTE